Communiqué de la section 14 du CNU

La section 14 (Études romanes) du Conseil National des Universités dénonce tant le fond du projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 (LPR) que la méthode suivie pour son adoption.
Les mesures adoptées par la Commission mixte paritaire le 9 novembre 2020 dégradent le statut national des enseignant·s-chercheur·ses et fragilisent leur indépendance : le texte supprime purement et simplement la qualification autorisant l’accès des maître·sses de conférences titulaires au corps des professeur·es ; il offre par ailleurs la possibilité aux établissements, à titre expérimental, de recruter directement les futurs maître·sses de conférences, sans qualification préalable par le CNU. Ce texte est une profonde atteinte au statut national des enseignant·s-chercheur·ses ; il favorise localisme, clientélisme, népotisme et copinage.
Par ses missions (qualification, avancement, CRCT, PEDR…), le CNU joue un rôle central dans la définition de nos disciplines et de la qualité des carrières de l’ensemble des collègues. Il est essentiel que ce travail soit et reste effectué par les pairs au niveau national, et non par quelque instance technocratique. C’est pourquoi ce sont donc non seulement nos statuts qui sont menacés, mais le coeur de nos savoirs et de nos pratiques.
L’amendement qui porte cette réforme, soutenu par le gouvernement, a été adopté par le Sénat dans la nuit du 28 au 29 octobre 2020, concomitamment à l’annonce du confinement. Le sujet n’a pas donné lieu à concertation avec le CNU, pas plus qu’à un débat en commission ni devant l’Assemblée nationale. Un texte d’une telle portée pour la qualité des recrutements, des enseignements et de la recherche ne peut être élaboré en catimini, à la hâte, ni entériné en commission mixte paritaire par la volonté de seulement dix parlementaires. Où était donc l’urgence d’imposer un tel texte en cette période, sinon pour s’assurer que l’Université confinée, ses enseignant·es et ses étudiant·es ne pourraient avoir de réactions visibles ?
La section 14 du CNU demande le rétablissement général des procédures de qualification et le retrait immédiat de l’article 3bis du projet de loi dans sa rédaction issue de la Commission mixte paritaire du 9 novembre 2020.
La section 14 du CNU demande aussi le retrait de l’amendement 234, qui constitue une pression politique inacceptable et porte atteinte aux libertés académiques et syndicales.
La section 14 du CNU décide :
– la suspension immédiate de l’ensemble des fonctions des membres de la section 14 du CNU pour une durée illimitée (nomination des rapporteurs dans le cadre de la procédure de qualification aux fonctions de maître·sse de conférences et de professeur·e, expertise des travaux et des thèses, tenue des sessions de qualification, sessions d’avancement de grades et de PEDR…) ;
– la cessation pour une durée illimitée de toute participation des membres de la section aux expertises réalisées au profit du Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) ; la section 14 appelle également l’ensemble des enseignant·es-chercheur.ses à suspendre leur participation à ces activités ;
– le soutien aux initiatives (suspension des cours, manifestations…) contre la LPPR portées par des enseignant·es-chercheur·ses se mobilisant en faveur de la sauvegarde de l’Université, de ses valeurs et de son indépendance.

Texte voté à l’unanimité le 16 novembre 2020.